A quelques mois de la prochaine élection présidentielle, celle d’octobre 2025, le premier secrétaire du Peuple uni pour la rénovation sociale (Purs) est volontiers présenté comme un panafricaniste sur le tard. La preuve même que ce candidat malheureux à la présidentielle de 2018 ne passe plus inaperçu dans le landernau politique camerounais bien trop surchargé. Certains d’être épié, il a accepté de répondre à l’invitation du programme Orin Talk Po du cabinet Orin Consulting afin de répondre aux questions des Camerounais de tous bords. Entretien.

Lorsque nous avons annoncé votre participation à cette discussion citoyenne et républicaine, une interrogation revenait sans cesse : Où était-il ? Que faisait-il ? Où était le Purs ? Est-ce seulement à l’approche des élections que les opposants décident de faire campagne ? De 2018 à presque 2025, soit sept années, le Purs, bien que souvent mentionné, semble peu impliqué dans le débat politique national. Pourtant, Espoir Matomba, je me rappelle qu’en 2018, le Purs était particulièrement actif sur les questions électorales et politiques. Le parti avait une présence remarquée et proposait des documents, des visions et des réflexions. Mais depuis 2018, il semble que cette dynamique ait été rompue. Pourquoi ? Où étiez-vous ?

Je pense que c’est une question que j’ai l’habitude de voir surgir sur les réseaux sociaux et ailleurs. Pourtant, lorsque l’on creuse réellement, on se rend compte que le Purs œuvre en permanence. Le Purs n’est pas un parti événementiel, il ne rend pas toutes ses actions publiques à chaque instant. Certes, le Purs ne réagit pas à chaque sujet, car il existe ce qu’on appelle la réserve en politique et la maîtrise des sujets. Lorsque l’on aspire à incarner la stature d’un homme d’État ou à construire un parti pour transformer le système, on ne se lance pas dans des discours superficiels. Depuis 2018, après les élections, nous avons immédiatement attaqué le code électoral. Nous avons invité d’autres partis politiques à nous rejoindre, certains ont répondu, d’autres ont tergiversé puis ont finalement suivi notre démarche. Juste après les élections, nous avons engagé des discussions avec le président de l’Assemblée, Elecam, des membres du gouvernement, et bien d’autres. En 2020, nous avons participé aux élections et mené plusieurs actions sur des sujets que nous jugions utiles et nécessaires. Ceux qui se demandent où était le Purs sont souvent les mêmes qui critiquaient son intervention sur tous les sujets, notamment lorsqu’il s’agissait de vacances du pouvoir ou de scandales montés de toutes pièces. Durant la pandémie de COVID-19, nous avons été actifs, refusant précipitamment les vaccins et prônant l’utilisation de la pharmacopée africaine. Nous ne sommes pas absents, nous analysons les dossiers en profondeur avec des spécialistes avant de nous prononcer. Par exemple, concernant le prétendu scandale d’Olembe, nous avons adopté une position distincte. Il est essentiel de comprendre que certaines distractions médiatiques sont orchestrées pour détourner l’attention du public. Nous devons être vigilants face à ces manœuvres et ne pas réagir de la même manière que les autres. Le Purs est présent, il travaille, et son action s’inscrit dans une stratégie réfléchie et durable. Nous avons appris de nos erreurs passées et choisi de manifester notre présence de manière plus soutenue à certains moments, tout en intervenant sur des sujets cruciaux pour la nation. Chaque prise de parole du Purs déclenche une réaction des gouvernants, témoignant de notre impact réel.

Vous avez mentionné que le pouvoir en place excelle dans l’art de la distraction et que tous les sujets ne captent pas l’intérêt du Purs. Pouvez-vous nous éclairer sur les sujets qui retiennent l’attention du Purs ? Sur quels domaines travaille-t-il ? Et quelle est la dernière proposition structurelle avancée par le Purs ?

Effectivement, le Purs se concentre sur les questions cruciales de la vie des Camerounais. Nous nous attaquons aux problèmes essentiels, tels que l’accès à l’eau, à l’électricité et autres besoins fondamentaux, qui, bien que semblant basiques, restent des enjeux majeurs dans notre société. Pour le Purs, la politique ne se limite pas aux périodes électorales ; il s’agit de répondre aux préoccupations quotidiennes de la population et de proposer des solutions concrètes. Notre démarche s’inscrit dans une volonté de rupture avec le système en place. Nous prônons la refondation du pays, car nous estimons qu’il est nécessaire de repartir de zéro pour reconstruire sur des bases solides. Le Cameroun traverse des problèmes profonds qui touchent tous les secteurs de la société. Aucun domaine ne fonctionne correctement en raison des dysfonctionnements systémiques. C’est pourquoi nous travaillons activement sur l’actualisation de notre projet de société, axé sur la refondation du pays. Ce projet englobe la réforme de la Constitution, du système économique, éducatif, culturel, et bien d’autres. Nous ne cherchons pas simplement à réformer les différents secteurs, mais à les refonder pour un changement radical et durable. Le Purs s’engage à créer un meilleur avenir pour les Camerounais en leur offrant des conditions de vie améliorées et en les préservant des injustices. Nous sommes pour une rupture constructive.

Concrètement, comment s’opère cette rupture ? Prenons un secteur tel que la fonction publique, par exemple. Comment abordez-vous cette question de la rupture ? Adoptez-vous une approche sectorielle ou idéologique pour vous démarquer du RDPC ? Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste cette rupture dans votre projet, notamment en ce qui concerne la formation professionnelle ou la sécurité ?

Le RDPC n’a pas de projet clair et cohérent. Il manque de vision et navigue sans cap défini. Pour répondre concrètement à votre question, nous estimons qu’il est impératif de reconstruire les fondements de la République du Cameroun. Cela passe d’abord par une modification de la Constitution afin de la rendre adaptée à nos réalités, notre environnement et nos traditions. Actuellement, notre Constitution est un simple copier-coller qui ne reflète pas notre identité nationale. Une fois cette refonte constitutionnelle opérée, nous pourrons redéfinir le profil du Camerounais que nous aspirons à devenir. Cette définition du profil camerounais guidera nos actions dans tous les secteurs. Il est essentiel de comprendre que l’éducation est le premier secteur à impacter tous les autres. L’éducation ne se limite pas à l’aspect académique, mais englobe également l’éducation familiale et civique. Une fois notre nouvelle Constitution établie, nous pourrons déployer notre vision à travers tous les secteurs d’activité, conformément au profil du Camerounais que nous aurons défini. En somme, notre approche de la rupture est globale et holistique. Elle se traduit par une refonte de nos fondements constitutionnels et une redéfinition de notre identité nationale, qui guide ensuite nos actions à travers tous les secteurs.

Envisagez-vous dans votre projet une Constitution plus nationaliste ou plus en accord avec les aspirations du peuple camerounais ? Étant donné votre proximité avec des figures comme Kémy Séba et Nathalie Yamb, quelle vision avez-vous pour une Constitution camerounaise plus ancrée dans la souveraineté nationale ?

Absolument, nous aspirons à une Constitution qui reflète véritablement la souveraineté et les intérêts du peuple camerounais. Notre objectif est de créer une Constitution qui garantisse les droits et les devoirs de chaque citoyen, qui protège l’État et la nation. Quant à nos relations avec des personnalités telles que Kémy et Nathalie, il est important de faire la distinction entre la connaissance et l’adhésion idéologique. Nous partageons des idées avec eux, mais cela ne signifie pas que nous adoptons nécessairement toutes leurs positions. Nous voulons une Constitution qui place le Camerounais au centre, qui favorise une économie nationale forte et une autosuffisance dans des domaines cruciaux tels que l’alimentation et la santé. Nous ne pouvons pas continuer à dépendre d’une économie de consommation et d’importation qui ne fait que fragiliser notre pays. Nous devons repenser notre modèle économique et nos accords internationaux pour garantir une véritable autonomie économique. Il est temps que le Cameroun prenne pleinement conscience de ses enjeux géopolitiques et géoéconomiques pour se structurer en interne de manière plus cohérente. Je rappelle d’ailleurs notre opposition aux accords de partenariat économique en 2014, car nous estimions que notre économie n’était pas prête à affronter les conséquences de ces accords. Malheureusement, nos avertissements ont été ignorés, et nous avons aujourd’hui des pertes économiques considérables à déplorer. Il est donc primordial de reconnaître l’urgence de réformer notre système économique pour permettre aux Camerounais de vivre dans des conditions dignes. Le Purs s’engage à refonder la nation camerounaise pour un avenir meilleur.

Espoir Matomba, votre parti se présente-t-il comme un parti de propositions qui ne cherche pas nécessairement le pouvoir immédiatement, ou bien visez-vous l’accès au pouvoir pour ensuite réformer le système ?

Il est important de comprendre qu’aucun parti politique ne se désintéresse du pouvoir. C’est une réalité à laquelle nous devons faire face. Lorsque nous évoquons nos propositions, elles s’inscrivent dans un contexte spécifique. Nous ne pouvons pas rester indifférents à la souffrance des Camerounais, même dans le cadre d’un système que nous considérons comme défaillant. Nous proposons des solutions dans l’attente de notre arrivée au pouvoir, car nous refusons de rester passifs face aux défis auxquels notre pays est confronté. Par exemple, dans le contexte de la crise dans les régions anglophones, nous ne pouvons pas attendre d’être au pouvoir pour proposer des solutions visant à mettre fin au conflit. Nous devons agir dès maintenant pour contribuer à la résolution de cette crise. Lorsque nous accéderons au pouvoir, nous résoudrons ces problèmes de manière définitive. Les propositions que nous avançons sont conçues pour apporter des solutions durables. Nous ne formulons pas des suggestions à moitié, en laissant des questions en suspens. Nous assumons notre responsabilité en tant qu’opposition en offrant des pistes de réflexion aux gouvernants, mais nous ne sommes pas responsables de leurs actions subséquentes. Il est essentiel de reconnaître que le pouvoir dépend souvent de l’accès aux ressources. Dans ce contexte, nous indiquons aux autorités les actions qu’elles peuvent entreprendre. Nous ne pouvons pas être tenus pour responsables de ce qui advient ensuite. Cette approche nous permet d’agir dans l’intérêt du peuple camerounais, même en tant qu’opposition. Nous sommes déterminés à aider notre population à surmonter les défis actuels, tout en nous préparant à gouverner de manière responsable lorsque nous accéderons au pouvoir.

Espoir Matomba, abordons la question cruciale : l’élection présidentielle de 2025. Êtes-vous candidat, oui ou non ?

Oui, nous avons entamé les préparatifs au sein du parti, ce qui a conduit à la mise en place des structures, sans toutefois reformer le bureau pour le moment. Cette étape sera franchie lors du congrès national du parti prévu en 2025. Lors de ce congrès, le choix du candidat du parti sera déterminé. Soyez assuré d’une chose : le Purs participera bel et bien à l’élection présidentielle. C’est une évidence. Quant à savoir si je serai le candidat, cela dépendra des membres du parti réunis lors du Congrès de 2025. C’est là la quintessence de la démocratie.

Interview réalisée avec le concours d’Orin Consulting

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