Dans une affaire qui soulève de sérieuses questions sur la sécurité dans la région du Sud-Ouest du Cameroun, le sous-préfet d’Idabato, EWANE Roland EKEH, kidnappé par des pirates le 1er octobre dernier, a finalement été libéré. Selon des sources proches du dossier, les autorités camerounaises ont dû verser une rançon pour obtenir sa libération, une pratique qui risque de fragiliser les efforts de lutte contre la piraterie dans cette zone stratégique.

Un enlèvement qui a secoué la région

EWANE Roland EKEH, haut fonctionnaire respecté, avait été enlevé alors qu’il était chez lui, dans sa résidence dans la localité d’Idabato, une zone côtière connue pour être un point chaud de la piraterie. Son kidnapping, ainsi que celui d’un employé du conseil local d’Idabato, avait provoqué une onde de choc dans la région. Les pirates, bien armés et organisés, avaient réussi à emmener leurs otages vers un pays voisin, probablement le Nigeria, selon des sources sécuritaires.

Pendant plusieurs semaines, les négociations ont été tendues. Les ravisseurs exigeaient une somme importante en échange de la libération du sous-préfet. Face à l’urgence de la situation et à la pression croissante de l’opinion publique, les autorités camerounaises ont finalement cédé, payant une rançon dont le montant exact reste confidentiel. Cette décision, bien que compréhensible sur le plan humanitaire, pose un sérieux dilemme : en acceptant de négocier avec les pirates, ne risque-t-on pas d’encourager de futurs enlèvements ?

Une libération sous haute surveillance

EWANE Roland EKEH a été libéré et se trouve actuellement au camp de la BIR (Brigade d’intervention rapide) à Jabane, où il bénéficie d’une prise en charge médicale et psychologique. Selon les premiers rapports, il est en bonne santé bien qu’ayant perdu du poids en raison des conditions difficiles de sa captivité. Il devrait être transféré à Buea dans la journée où il doit être présenté au gouverneur de la région avant d’être remis à sa famille pour poursuivre son rétablissement.

Cependant, l’employé du conseil local d’Idabato, kidnappé en même temps que le sous-préfet, reste en captivité. Cette situation souligne la complexité des négociations avec les groupes criminels, qui utilisent souvent les otages comme monnaie d’échange pour maximiser leurs gains. Les autorités camerounaises affirment continuer à travailler pour obtenir sa libération, mais les détails sur les démarches en cours restent flous.

Un défi sécuritaire persistant

La libération du sous-préfet d’Idabato met en lumière les défis sécuritaires auxquels fait face le Cameroun dans sa lutte contre la piraterie. La région du Sud-Ouest, riche en ressources halieutiques et stratégique pour le commerce maritime, est régulièrement ciblée par des groupes armés. Ces derniers profitent de la porosité des frontières et de la faiblesse des moyens de surveillance pour mener leurs opérations.

Les autorités camerounaises ont renforcé leur présence militaire dans la zone ces dernières années, mais les résultats restent mitigés. Les pirates, souvent bien informés et mobiles, parviennent à contourner les dispositifs de sécurité. Le paiement de rançons, bien que compréhensible dans des cas extrêmes, risque de fragiliser davantage la situation en incitant d’autres groupes criminels à passer à l’acte.

Une question de principe et de stratégie

La décision de payer une rançon pour libérer le sous-préfet d’Idabato soulève des questions éthiques et stratégiques. D’un côté, il est difficile de reprocher aux autorités d’avoir tout mis en œuvre pour sauver la vie d’un fonctionnaire dévoué. De l’autre, cette démarche pourrait envoyer un message dangereux aux groupes criminels, qui pourraient y voir une incitation à multiplier les enlèvements.

Pour rompre ce cercle vicieux, les experts en sécurité recommandent une approche multidimensionnelle : renforcer la coopération régionale avec les pays voisins, améliorer les capacités de surveillance maritime et investir dans le développement économique des zones côtières pour réduire l’attrait de la piraterie. En parallèle, il est crucial de mettre en place des mécanismes de protection pour les fonctionnaires et les populations locales, tout en évitant de céder aux exigences des ravisseurs.

La libération du sous-préfet EWANE Roland EKEH est une bonne nouvelle, mais elle ne doit pas occulter les défis persistants auxquels fait face le Cameroun dans sa lutte contre la piraterie. Les autorités doivent maintenant trouver un équilibre délicat entre la protection des vies humaines et la nécessité de ne pas encourager les activités criminelles. Sans une stratégie claire et coordonnée, la région risque de rester un terrain de jeu pour les groupes armés, avec des conséquences désastreuses pour la stabilité et le développement économique.

Emmanuel Ekouli

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