Bangui, 6 mai 2025 – L’extradition du chef rebelle centrafricain Armel Sayo, ancien ministre et figure controversée de la rébellion, a marqué un tournant dans les tensions politiques et sécuritaires en République centrafricaine (RCA). Arrêté en janvier dernier au Cameroun, Sayo a finalement été transféré dans la nuit du 5 mai vers Bangui, après des mois de négociations diplomatiques et judiciaires entre les autorités camerounaises, centrafricaines et françaises.

Une arrestation et une extradition sous haute tension

Armel Sayo, commandant du groupe armé Coalition militaire de salut du peuple et du redressement, était sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis son appel à renverser le gouvernement centrafricain en 2024. Son arrestation a eu lieu en janvier à l’aéroport international de Douala, alors qu’il tentait de s’envoler pour la France.

Son extradition vers Bangui a pris près de quatre mois en raison de complications juridiques. « Il voyageait avec un passeport français, et le Cameroun exigeait l’accord de Paris avant de procéder à son transfert », a expliqué Fidèle Nguandjika, ministre-conseiller à la présidence centrafricaine, dans un entretien avec RFI. Bien que les autorités camerounaises n’aient pas officiellement confirmé cette version, les sources sécuritaires indiquent que Yaoundé a finalement accepté de coopérer après des pressions diplomatiques accrues.

Une arrivée sous surveillance médiatique

Les images de son arrivée à Bangui, diffusées par la chaîne russe RT, montrent un Armel Sayo souriant, vêtu d’un tee-shirt jaune et menotté, descendant d’un avion sous escorte policière. Contrairement à d’autres transferts de personnalités politiques, la couverture médiatique a été limitée, seuls quelques journalistes ayant été autorisés à assister à l’événement.

Immédatement après son atterrissage, Sayo a été conduit à la Direction générale de la police pour un interrogatoire, avant d’être incarcéré à la prison militaire de haute sécurité du Camp de Roux, un lieu connu pour détenir les opposants politiques et les chefs rebelles.

Des accusations graves et des risques judiciaires majeurs

Sayo est accusé de « tentative de coup d’État » et de « menace de déstabilisation » du régime en place. S’il est reconnu coupable, il encourt la prison à vie, une peine déjà prononcée contre d’autres figures rebelles ces dernières années.

Cette affaire dépasse le seul cas d’Armel Sayo : son frère et sa sœur, ainsi qu’une dizaine de ses proches, sont également détenus en RCA depuis janvier, dans ce qui semble être une vaste opération de neutralisation de son réseau.

Un contexte politique toujours volatile

L’extradition de Sayo intervient dans un climat politique tendu en Centrafrique, où le pouvoir du président Faustin-Archange Touadéra reste contesté par plusieurs groupes armés. Bien que les accords de paix aient permis une relative stabilisation, la réapparition de factions dissidentes comme celle de Sayo rappelle la fragilité du processus.

Certains observateurs craignent que cette arrestation n’attise les tensions, notamment dans les régions où les partisans de Sayo restent actifs. D’autres y voient au contraire un signal fort envoyé par Bangui et ses alliés internationaux contre les velléités de rébellion.

Quelle suite pour Armel Sayo ?

Son procès devrait s’ouvrir dans les prochaines semaines, sous haute sécurité. Les défenseurs des droits de l’homme suivront de près les conditions de sa détention et la régularité de la procédure judiciaire, alors que la RCA est régulièrement critiquée pour son traitement des opposants politiques.

Entre règlements de comptes politiques et enjeux sécuritaires, l’affaire Armel Sayo illustre les défis persistants d’un pays encore en quête de stabilité.

Sebaï Gaëtan à Bangui

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