
Le Tribunal Arbitral du Sport (TAS) a clos un feuilleton juridique épineux en confirmant, ce mercredi, les sanctions contre la Kadji Sports Academy (KSA), offrant à Samuel Eto’o, président de la Fédération Camerounaise de Football (FECAFOOT), une victoire retentissante. Une décision qui renforce l’autorité de l’ancienne légende du football et illustre sa détermination à réformer l’écosystème footballistique camerounais.
Un conflit de licences aux lourdes conséquences
Tout commence en 2023, lorsque la KSA, club évoluant en ligue régionale du Littoral, accuse la FECAFOOT de ne lui avoir délivré que 10 licences sur les 48 demandées pour la saison 2023-2024, dont seulement deux pour les gardiens. Une situation intenable pour le club, contraint de déclarer forfait à plusieurs reprises, avant de boycotter les compétitions. La FECAFOOT, par la voix de sa Commission d’homologation et de discipline, réplique par des sanctions drastiques : relégation de deux divisions pour le club, suspension de cinq ans pour son président Gilbert Kadji, et une amende de 5 millions de FCFA.
La KSA conteste alors ces mesures devant le TAS, esquivant les instances nationales. Mais après des mois de procédure, le verdict tombe : non seulement les sanctions sont maintenues, mais le club devra également verser 3 000 francs suisses à la FECAFOOT et prendre en charge 80% des frais judiciaires. Une issue sans appel qui sonne comme un désaveu cinglant pour la KSA.
Eto’o, stratège inflexible
Pour Samuel Eto’o, cette décision valide une ligne de conduite : celle d’un président intransigeant sur le respect des règles. Depuis son élection en 2021, l’ex-attaquant international multiplie les réformes pour professionnaliser le football local, souvent au prix de vives tensions. « Cette victoire n’est pas personnelle, mais celle d’un football camerounais structuré et transparent », a-t-il déclaré dans un communiqué. « Le TAS reconnaît la légitimité de nos actions. Aucun club, aussi influent soit-il, ne peut se soustraire à ses obligations. »
Des propos qui font écho aux défis rencontrés par Eto’o depuis son arrivée : grèves de joueurs, critiques sur la gestion des ligues, ou encore des accusations de clientélisme. Mais cette décision du TAS, instance suprême du sport mondial, lui offre une légitimité inédite. « C’est un message fort : la FECAFOOT under Eto’o ne cédera pas aux pressions », analyse un expert juridique sportif sous couvert d’anonymat.
La KSA au bord du précipice
Du côté de la KSA, fondée en 1998 par l’homme d’affaires Gilbert Kadji, le choc est brutal. Reléguée en quatrième division, le club risque de perdre ses sponsors et ses talents. Contacté par nos soins, un membre de la direction dénonce « une décision disproportionnée », évoquant « un acharnement institutionnel ». Pourtant, selon des sources internes à la FECAFOOT, le dossier de la KSA était émaillé d’irrégularités, notamment des licences incomplètes et des paiements non honorés.
Un précédent pour l’avenir
Au-delà de l’affaire KSA, cette décision crée un précédent. Elle rappelle que les clubs doivent se conformer aux exigences administratives, sous peine de sanctions sévères. « Cela devrait inciter les autres équipes à régulariser leur situation », souligne un responsable de ligue régionale.
Pour Eto’o, l’enjeu est aussi de restaurer la crédibilité du football camerounais, souvent entachée par des scandales de corruption ou de mauvaise gestion. En s’appuyant sur des instances internationales comme le TAS, il assoit son image de réformateur, à l’approche de la Coupe d’Afrique des Nations 2025 que le Cameroun ambitionne d’organiser.
L’heure des comptes
Si la KSA envisageait un recours, le TAS a rendu une décision définitive. Reste maintenant à savoir comment le club, pilier du football local, se reconstruira. Pour Samuel Eto’o, le défi sera de transformer cette victoire juridique en dynamique collective, en apaisant les tensions avec les autres clubs. Une tâche ardue, mais que le président abordera sans doute avec la même détermination que sur les terrains.
Emmanuel Ekouli