Yaoundé, Cameroun – Alors que le Cameroun peine à redresser une balance commerciale déficitaire depuis des décennies, le gouvernement persiste dans des choix économiques aussi incohérents que destructeurs. Plutôt que de stimuler une véritable industrialisation locale ou de moderniser l’agriculture, les autorités préfèrent inonder le marché de produits importés à bas prix, sous couvert de « soutien au pouvoir d’achat ».

Une politique commerciale qui tue l’industrie locale

Lancée le 3 juin 2025, l’« Opération de vente promotionnelle des produits de grande consommation » sur le Boulevard du 20 Mai à Yaoundé est présentée comme une initiative salvatrice pour les ménages. Pourtant, derrière les discours lénifiants du ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, se cache une logique économique désastreuse.

« Circuit court », clame-t-on ? La formule est séduisante, mais elle ne résiste pas à l’analyse. En réalité, cette opération encourage massivement l’importation, au détriment des producteurs locaux. Des produits comme le riz, les huiles végétales, les sardines ou les pâtes alimentaires sont majoritairement issus de l’étranger. Pendant ce temps, les petites entreprises camerounaises, déjà asphyxiées par la concurrence déloyale et le manque de soutien étatique, voient leurs débouchés se réduire comme peau de chagrin.

Le Cameroun jadis fut un pays producteur de riz, le pays dépense aujourd’hui des sommes colossales pour importer le précieux sésame

Le mirage du « pouvoir d’achat »

Le gouvernement justifie ces ventes promotionnelles par la nécessité d’aider les ménages en cette période de vie chère. Mais à quel prix ? Une politique de court terme qui hypothèque l’avenir du pays.

En privilégiant les importations bon marché, l’État camerounais :

  • Décourage la production locale, alors que le pays dispose d’un potentiel agricole et industriel immense.
  • Perpétue la dépendance économique, en important ce qu’il pourrait produire (riz, huile, poisson, etc.).
  • Affaiblit la balance commerciale, creusant davantage un déficit déjà abyssal.

Pendant que les consommateurs se réjouissent de prix temporairement bas, ils ne voient pas que cette stratégie les condamne, à long terme, à une plus grande précarité. Sans industrie locale forte, sans agriculture compétitive, le Cameroun restera un éternel mendiant des marchés internationaux.

Le pays produit pourtant ses propres huiles végétales…

L’urgence d’une véritable politique industrielle et agricole

Le Cameroun n’a pas besoin de distributions ponctuelles de produits importés. Il a besoin :

  1. D’une industrialisation réelle, avec des usines transformant les matières premières locales.
  2. D’une agriculture moderne, passant de la subsistance à l’agro-industrie.
  3. D’un protectionnisme intelligent, pour favoriser les entreprises camerounaises face à la concurrence étrangère.

Au lieu de cela, le gouvernement préfère des mesures cosmétiques, qui donnent l’illusion d’agir sans s’attaquer aux vrais problèmes.

Un choix politique qui interroge

Derrière cette opération se cache une triste réalité : les dirigeants camerounais manquent de vision économique. Plutôt que de bâtir une économie résiliente, ils optent pour des solutions faciles, qui maintiennent le pays dans la dépendance.

Si le Cameroun veut vraiment sortir de la pauvreté, il doit cesser de se comporter comme un comptoir commercial et devenir un pays producteur. Sinon, ces ventes promotionnelles ne seront que le symbole d’une politique économique en faillite.

Il est temps de choisir : être un marché pour les autres, ou devenir une puissance pour nous-mêmes.

Emmanuel Ekouli

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