Alors que Paul Atanga Nji s’érige en censeur des partis opposants, le RDPC piétine allègrement ses propres règles internes, comme le révèle une récente assignation en référé de Léon Theiller Onana

L’hypocrisie politique a rarement atteint un tel niveau au Cameroun. Alors que le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, multiplie les intimidations contre les formations politiques rivales, notamment le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) de Maurice Kamto et le Parti Camerounais pour la Réconciliation Nationale (PCRN) de Cabral Libii, son propre parti, le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), est accusé de violer ses propres textes. Une assignation en référé, notifiée ce 18 juin 2025 à Elecam par un conseiller municipal du parti au pouvoir, Léon Theiller Onana, vient jeter une lumière crue sur ces contradictions.

Un communiqué de presse qui montre bien que rien ne sera plus comme avant…

Un congrès ordinaire en souffrance : Le RDPC dans l’Illégalité ?

Dans son communiqué, Léon Theiller Onana, élu RDPC de Monatélé, révèle avoir officiellement saisi le président d’Elecam pour exiger la désignation d’un mandataire ad hoc chargé de convoquer le congrès ordinaire du parti. Selon lui, sans cette assemblée préalable, le RDPC ne peut légalement investir un candidat à la présidentielle de 2025.

« Notre parti ne saurait, en l’état actuel, investir un candidat à l’élection présidentielle de 2025 sans la tenue préalable d’un congrès ordinaire », avertit-il. Une mise en garde qui sonne comme un aveu : le RDPC, souvent prompt à exiger des autres partis une rigueur administrative qu’il ne s’applique pas à lui-même, serait en train de contourner ses propres règles.

Pire, l’élu met en garde Elecam contre toute validation d’une candidature non conforme : « Toute dérogation reviendrait à autoriser le RDPC à présenter plusieurs candidats à cette élection présidentielle ». Une situation qui rappelle les dérives des scrutins précédents, où la partialité de l’institution électorale avait été maintes fois dénoncée.

Paul Atanga Nji, le « gardien autoritaire » d’un parti en désordre

Cette révélation intervient dans un contexte où le ministre Paul Atanga Nji, connu pour son zèle répressif, multiplie les attaques contre les opposants. Récemment encore, il a menacé de dissolution le MRC et le PCRN, les accusant de « troubles à l’ordre public ». Une rhétorique bien rodée, destinée à museler toute voix discordante à l’approche de l’échéance électorale.

Mais comment un parti qui bafoue ses propres statuts peut-il exiger des autres formations qu’elles respectent scrupuleusement la loi ? La question mérite d’être posée, tant l’écart entre les discours et les actes du RDPC semble abyssal.

Elecam sous pression : La neutralité en question

Dans son communiqué, Léon Theiller Onana interpelle directement Elecam : « Le moment est venu pour ELECAM d’affirmer, urbi et orbi, sa neutralité vis-à-vis de l’administration et de l’autorité politique dont ils tiennent leurs nominations ». Un appel qui ressemble à une charge contre les connivences supposées entre l’organe électoral et le pouvoir.

Depuis des années, Elecam est accusé de partialité, ses membres étant majoritairement issus des rangs du RDPC. Si l’institution ne réagit pas à cette assignation, elle confirmera une fois de plus son rôle de chambre d’enregistrement des décisions du parti au pouvoir.

Une présidentielle 2025 déjà minée par les irrégularités ?

À quelques mois du scrutin, cette affaire jette une ombre sur le processus électoral. Le RDPC, qui se présente comme le garant des institutions, apparaît de plus en plus comme un parti en pleine contradiction, prêt à ignorer ses propres textes pour préserver son hégémonie.

Entre les manœuvres internes et la répression des opposants, le régime semble jouer une partition dangereuse : celle d’un pouvoir qui, tout en refusant toute transparence, s’érige en seul maître du jeu politique.

Le Cameroun mérite mieux

Alors que les militants du MRC et du PCRN subissent arrestations et intimidations, les dissensions au sein même du RDPC montrent que le parti au pouvoir est loin d’être un modèle de démocratie. Le double discours est évident : durcir les conditions pour les opposants tout en s’affranchissant des règles.

Si le Cameroun veut éviter une nouvelle crise post-électorale, il est urgent qu’Elecam et les autorités garantissent un processus équitable. Mais à en juger par les récents événements, l’espoir d’une élection libre et transparente s’amenuise de jour en jour.

Emmanuel Ekouli

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