
Montaigu (Vendée), ce samedi 6 avril 2024 – La légende vivante du football africain, Samuel Eto’o, a assisté, impuissante, au naufrage des siens. Dans l’enceinte du stade de Montaigu, théâtre habituel des espoirs footballistiques, le Cameroun a subi une déroute sans appel face à l’équipe de France U16 (4-0), scellant son élimination prématurée du prestigieux tournoi international. Sous un ciel gris de Vendée, le symbole était lourd : le président de la Fecafoot, venu porter son aura à une jeune garde camerounaise en quête de repères, a vu son héritage éclaboussé par une défaite qui interroge l’avenir du football national.
L’arrivée d’Eto’o, une étincelle dans la nuit
L’effervescence était palpable dès l’aube à Montaigu. La présence de Samuel Eto’o, quadruple Ballon d’Or africain et figure intouchable du football camerounais, avait électrisé les supporteurs venus en nombre. Certains scandaient son nom, d’autres brandissaient des maillots du Barça ou de l’Inter Milan, rappelant l’âge d’or du « Lion Indomptable ». Mais derrière les sourires et les poignées de main échangées avec les officiels, le président de la Fecafoot cachait mal son inquiétude. Depuis sa prise de fonction en 2021, Eto’o a fait de la formation des jeunes sa priorité absolue, promettant de « réveiller le géant endormi ». Ce match contre la France, terre de football-roi, devait être un test révélateur.
4-0 : le réveil brutal
Dès le coup d’envoi, les espoirs se sont envolés. Les Bleuets, techniquement supérieurs et physiquement dominateurs, ont infligé une leçon de réalisme aux Camerounais. En première mi-temps, deux buts rapides (12ᵉ et 23ᵉ) ont plongé les Lions Juniors dans le doute. Malgré quelques sursauts portés par le milieu de terrain Mbeleck (17 ans), l’équipe camerounaise a croulé sous les vagues offensives françaises. La deuxième mi-temps n’a été qu’une formalité : deux nouveaux buts (58ᵉ et 72ᵉ) sont venus noircir un tableau déjà sombre. « On a manqué de tout : de lucidité, de concentration, de maturité », a lâché, désemparé, l’entraîneur camerounais Jean-Pierre Fiala en conférence de presse.
Eto’o, entre silence éloquent et colère froide
Assis en tribune, Samuel Eto’o n’a pas quitté des yeux le terrain, le visage fermé. À la fin du match, il a refusé tout commentaire, se contentant de serrer quelques mains avant de regagner rapidement son véhicule. Un silence lourd de sens, analysé comme un aveu d’échec par les observateurs. « Son absence de réaction en dit long sur le choc, confie un membre de la délégation camerounaise sous couvert d’anonymat. Il avait mis beaucoup de pression sur cette génération, en leur disant qu’ils étaient l’avenir. Aujourd’hui, c’est un coup dur. »
Quel avenir pour les Lions juniors ?
Cette élimination cruelle pose une question cruciale : le Cameroun a-t-il les moyens de ses ambitions ? Alors que la Fecafoot a multiplié les partenariats avec des académies européennes et lancé des programmes de détection, le fossé avec les nations leaders semble se creuser. « On ne s’améliore pas en un claquement de doigts, tempère Paul Nguemo, ancien international. Mais il faut être honnête : nos structures ne sont pas au niveau. La France a des centaines de centres de formation ; nous, on mise sur le talent brut. »
Reste que Samuel Eto’o, habitué aux défis titanesques, ne baisse pas les bras. Dans un communiqué publié en fin de journée, la Fecafoot a promis de « tirer les leçons de cette expérience » et de « poursuivre la modernisation du football camerounais ». Mais à Montaigu, ce samedi, le rêve s’est éteint bien trop tôt. Et sous les projecteurs, l’icône Eto’o a peut-être compris que la gloire passée ne suffira pas à écrire l’avenir.
Emmanuel Ekouli