Le gouvernement a annoncé vendredi dernier une augmentation des prix de l’essence et du gasoil, un après celle survenue en février 2023. Un véritable coup de massue pour les Camerounais qui tirent déjà le diable par la queue. Même si les autorités envisagent quelques fébriles mesures d’accompagnement, il faut s’attendre que le taux d’inflation soit à son pic, et à une asphyxie certaine des petits ménages. Pourtant il y avait une alternative à cette augmentation.
Une hausse mécanique des prix
Attendue depuis la fin du discours du chef de l’Etat du 31 décembre dernier, la hausse des prix de certains produits a finalement été actée vendredi dernier.
Comme il fallait s’y attendre, faute d’idées, le gouvernement a fini par annoncer vendredi dernier l’augmentation des prix de certains produits pétroliers.Selon le communiqué du Secrétaire général des services du premier ministre Séraphin Magloire Fouda, le litre de gasoil se payera désormais à 828 Fcfa contre 720 Fcfa par le passé, soit une augmentation de 108Fcfa (+13%). Le litre du super, lui passe de 730 Fcfa à 840 Fcfa, soit une progression de 110 Fcfa en valeur absolue et de 15% en valeur relative. Les prix du gaz domestique et du pétrole lampant restent inchangés respectivement à 6500 Fcfa la bouteille de 12,5kg et 350 Fcfa pour le litre de pétrole. La mesure gouvernementale a pris effet à partir du 03 février.
L’annonce du gouvernement qui prenait effet dès le lendemain a entrainé une hausse immédiate des prix du transport. L’agence Touristique voyage qui dessert plusieurs localités du pays a affiché une nouvelle grille des prix. Le transport de la ligne Bertoua Belabo qui coutait 1500 Fcfa un jour avant est passé à 2000 Fcfa, soit une augmentation de 500 Fcfa en valeur absolue et 25 % en valeur relative. Pour Bertoua, Nguelmendouka, le transport est passé de 3000Fcfa à 4500, soit une augmentation de 50%. Le même phénomène a été vécu sur d’autres lignes de transport. Les autorités essayent encore de dissuader les transporteurs véreux, qui essayent d’augmenter les prix de façon unilatérale, mais il est évident que cette dissuasion ne va durer que le temps d’un feu de paille. A partir de la semaine prochaine, il faudra s’attendre à une inflation générale qui pourra avoisiner les 10 % selon certains spécialistes. L’année dernière, les produits alimentaires ont connu une inflation de plus de 10% sur les 8 mois suivants l’augmentation des prix du carburant, dépassant largement le taux de 3 % fixé par la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (Cemac). Les prix du transport quant à eux sont montés à plus de 16 % selon l’institut national de la statistiques (INS). En comparaison avec 2022, les prix des produits après l’augmentation des prix du carburant ont augmenté de 7% . Et dans les différentes capitales régionales, l’inflation étaient restée supérieure à 9%.
A l’évidence de ces chiffres, le panier de la ménagère devra logiquement se vider davantage. Et il faudra surtout s’attendre à ce que certains fléaux, notamment le banditisme, le vol, les agressions dus à pauvreté augmentent.
L’accompagnement une entourloupe du gouvernement
Afin d’accompagner la hausse des prix de certains produits pétroliers, le gouvernement a également décidé d’une augmentation de 5 % du salaire de base des agents publics. Une mesure discriminatoire et inefficace devant l’avalanche des conséquences que va entrainer la hausse.
Que valent les valent les 5% d’augmentation sur le salaire de base décidés par le gouvernement comme mesure d’accompagnement de la hausse de certains produits pétroliers ? Pas grand-chose selon certains les avis les moins tranchés. Pour les extrémistes, il s’agit tout simplement d’une entourloupe, mieux une escroquerie du gouvernement.
Tout d’abord les salaires de base de la fonction publique sont très bas. Calculette en main, pour avoir 10.000 Fcfa d’augmentation, il faut avoir un salaire de base de 200.000 Fcfa. Une possibilité rare au sein de la fonction publique camerounaise où la moyenne des salaires de base atteint à peine 100.000 Fcfa et où la plupart des petits agents touchent un salaire de base qui tourne autour de 60. 000 Fcfa. Après l’augmentation de 5 % , on se demande, si les bénéficiaires de cette mesure pourront à peine amortir les 10 % des charges qui vont s’ajouter sur les dépenses générales.
Ensuite le nombre de bénéficiaires de cette augmentation ne représente pas grand-chose, sur l’échiquier des consommateurs au Cameroun. On les estime à peine à 12 % de la population du Cameroun. Un récent décompte du nombre de fonctionnaire situait à près de 350 000 le nombre de personnes qui émergent dans les caisses de l’Etat. Non seulement cette mesure d’augmenter le salaire des agents de l’Etat, est discriminatoire parce qu’elle ne touche qu’une certaine tranche de la population, mais aussi elle creuse davantage la fracture sociale. Car les plus démunies de la société qui ont d’ailleurs le plus besoin d’un accompagnement n’ont pas été comptés dans les mesures annoncées par l’Etat. Au contraire c’est eux qui risquent de payer le prix le plus lourds. Car faute d’une mesure efficace d’accompagnement, les agents de l’Etat les plus véreux risquent de se livrer plus que par le passé au monnaye des services, la corruption et l’arnaque.
Le risque d’une grève
Aussitôt la hausse des prix des produits pétroliers envisagés, plusieurs organisations de la société civile ont annoncé des manifestations. Et les autorités craignent déjà un mouvement d’humeur de grande ampleur.
Le pays est en alerte maximale après l’annonce de l’augmentation des prix de certains produits pétroliers faites vendredi dernier par le gouvernement. Plusieurs Camerounais craignent en effet que l’histoire de 2008, où le pays avait connu une vague de mouvement d’humeur après la hausse des prix du carburant se répète. Dans une sortie publiée sur sa page Facebook, le député Cabral Libii, a écrit : « que veulent-ils faire avaler aux camerounais devenus subitement « partenaires » ? Une entourloupe sans le moindre doute. Inutile de créer une crise sociale ». Quelques jours avant, le président national du Parti Camerounais pour la Réconciliation Nationale avait dit sa ferme opposition à cette augmentation estimant que l’État ne doit pas raconter des bobards aux Camerounais pour justifier l’augmentation des prix du carburant. Selon lui, « l’État dispose d’autres leviers pour juguler la subvention, il suffit de mettre fin à l’incurie, instaurer la transparence et la rationalité. Inutile donc de créer une crise sociale », at-il indiqué.
Dans une lettre ouverte datée du 12 janvier, des membres engagés de la société civile au Cameroun avaient déjà mis en garde le président de la République contre des manifestations pacifiques nationales en réponse à l’augmentation prévue des prix des produits pétroliers. Les signataires, comprenant des défenseurs des droits des consommateurs et des patriotes, expriment leur inquiétude quant aux répercussions de cette hausse sur le pouvoir d’achat des citoyens.
Les autorités en sont d’ailleurs conscientes de ce risque de soulèvement. Emmanuel Mariel Djikdent, le préfet du département du Mfoundi vient de tirer la sornette d’alarme sur un éventuel mouvement d’humeur dans sa circonscription de commandement. Dans un message porté qui circule sur les réseaux sociaux et adressé aux administrations territoriales et aux services spécialisés de la Gendarmerie et de la Police, on peut lire : « velléités mouvements d’humeur divers secteurs. Meneurs voulant prendre un prétexte sur le carburant et vie chère. Manipulations possibles en vue entraîner des jeunes dans la rue et grève des transporteurs. Par conséquent Vous demandez : Primo Rester d’alerte ; secundo signaler tous les regroupements ou mouvements suspects ; Tertio surveille les milieux connus sensibles ; Quarto demander aux hommes sur le terrain à ne pas céder à toute éventuelle provocation, en outre Sous-Préfets ne délivrerons aucune autorisation de marche », écrit Emmanuel Mariel Djikdent, après l’annonce de la hausse des prix.
Les Camerounais souffre-douleur de la sous-région
Producteur et importateur de pétrole, le Cameroun est l’un des pays de cette catégorie où les prix des produits issus du pétrole sont le plus élevés dans la Communauté des Etats de l’Afrique centrale et ailleurs. Pourtant en terme de revenus, le pays de Paul Biya est aussi l’un des endroits où les salaires les plus bas sont pratiqués.
Les hommes vivants dans le pays de Paul Biya sont certainement les souffre-douleurs de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (Cemac), tout du moins en ce qui concerne les prix des produits pétroliers et des salaires. Une petite comparaison des prix de l’essence pratiqués dans les différents pays de la sous-région nous laisse voir qu’en dehors de la République centrafricaine où le prix du carburant s’élève à 1300 Fcfa, le Cameroun est le deuxième pays où les prix sont les plus élevés. Au Cameroun, le litre d’essence coute 830 Fcfa, alors que chez ses voisins du Gabon, de la Guinée équatoriale, du Tchad, le litre du super est vendu respectivement à 595, 570, 570 Fcfa. Et pour sortir de cette zone, au Nigeria voisin, le litre de l’essence caracole autour de 500 Fcfa. Pourtant autant que Libreville, Malabo, Ndjamena, et Abudja, Yaoundé qui produit au préalable le pétrole brut, dépend aussi des importations pétrolières.
En faisant la même comparaison avec la bouteille de 12.5 kg gaz domestique, au Cameroun, elle est vendue à 6500 Fcfa, tandis que qu’au Gabon elle coute : 5950, au Tchad et en RDC, elle est s’arrache : moins de 4000 et plus loin en Côte d’Ivoire elle se prend à 5200 Fcfa, tandis qu’au Burkina Faso, elle s’achète entre 5500 et 6500 en fonction des villes.
Ces petites comparaisons non exhaustives montrent clairement que les produits pétroliers coutent plus chers au Cameroun par rapport à certains pays. Pourtant en terme de revenus, les salaires des agents de l’Etat dans la plupart de ces pays sont plus élevés qu’au Cameroun. En outre le Cameroun a l’avantage par rapport à tous ces pays qu’en plus d’être producteur et importateur, le Cameroun est également une zone de transit du pétrole qui vient du Tchad et perçoit des dividendes sur chaque litre de pétrole tchadien.
A cet avantage, il faut ajouter le fait que le Cameroun a accès à plusieurs ports. Ce qui facilite l’importation du pétrole, contrairement à certains pays comme le Tchad dont les importations pétrolières transitent par le Cameroun. On comprend donc difficilement comment les produits pétroliers sont autant chers au Cameroun par rapport aux autres pays.
La subvention du carburant : une manipulation d’Etat
Pour justifier l’augmentation des prix du carburant, le gouvernement évoque une enveloppe de la subvention qui a couté environ 1000 milliards à l’Etat en 2023, pourtant la cherté des produits pétroliers est due aux multiples taxes et droits imposés sur le prix des produits.
Entre l’entrée des bateaux au port de Douala, et les station- services, les produits pétroliers sont soumis à plusieurs impôts et taxes qui grossissent le net à payer à la pompe.
Selon la structure des prix du mois de juillet 2022 (avant les deux augmentations de février 2023 et 2024) de la Caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures (Csph), entre la Société nationale de raffinage (Sonara) et les stations-service, les produits pétroliers subissaient de nombreuses taxes, droits et impôts. Dans le dépôt de Douala-Bonaberi, le litre de Super importé coûte 666,20 francs CFA, le pétrole lampant 776,62 francs CFA, et le gasoil 767,40 francs CFA, renseigne le document de la Csph. Sorti de l’usine, le produit subit plusieurs taxes et impôts. Ceux-ci vont du droit de douanes qui s’élève au mois de juillet 2022, à 66.52 francs CFA pour le Super, 76.66 francs CFA pour pétrole lampant et 76.74 francs CFA pour le gasoil dans la même période ; la Tva coute au mois de juillet 2022, 140.86 francs CFA pour le super ; 0 francs pour le pétrole lampant et 162.50 francs CFA pour le gasoil ; le cout du service d’importation vaut 73.17 francs CFA pour le super, 84.99 francs CFA pour le pétrole lampant et 84.41 francs CFA pour le gasoil ; la marge de l’importateur absorbe 16 francs CFA pour le super, c’est le même cout pour le pétrole lampant et le gasoil ; la TVA sur la marge de l’importateur quant à elle est taxée à 3.08 francs CFA. Tout ceci pour un cout de revient du produit importé qui s’élève à 976.97 pour le super, 960.68 pour le pétrole lampant et 1124.14 pour le gasoil.
A ces taxes il faut ajouter les redevances portuaires qui engloutissaient 1.04 francs CFA pour le super, 1.23 francs CFA pour le pétrole lampant et 1.39 francs CFA pour le gasoil ; La TVA sur la redevance portuaire coute 0.20 francs CFA pour le super, 0.24 pour le pétrole lampant et 0.27 pour le gasoil ; la taxe spéciale à elle seule prend 110 francs CFA pour le super et 65 francs CFA pour le gasoil ; le soutien à la raffinerie qui ne fonctionne pas depuis l’incendie continue d’absorber 47.88 francs CFA pour chacun des produits, tandis que la péréquation du transport coute 47.88 francs pour chaque litre sur les trois produits etc…
Pour plusieurs experts, c’est sur cette batterie de taxes qu’il faut agir. Les regards sont le plus rivés vers la Taxe sur la Valeur Ajoutée, qui coûte à elle seule 140.86 francs CFA. «La structure du prix du carburant au Cameroun comporte de nombreuses taxes qui se chevauchent et enflent injustement le prix. Un meilleur réexamen de la structure des prix selon eux, pourrait permettre de l’ajuster et de réduire par la même occasion le poids de la subvention », commente Pierre Alaka Alaka, expert fiscaliste hors hiérarchie.
D’autres experts plaident pour la suppression de d’autres taxes notamment le soutien à la raffinerie, la Tva sur le cabotage, les redevances portuaires, les frais généraux. Et une diminution des autres taxes de douanes.
Un troisième appelle à une restructuration de la Société nationale de raffinerie (Sonara). « La Sonara est aujourd’hui un simple commerçant des produits pétroliers. Pour revenir à son rôle et à sa mission économique, et contribuer à la maîtrise des prix des produits pétroliers, son actionnaire majoritaire qu’est l’État doit tout mettre en œuvre pour garantir la préparation, la construction et la mise en service, le plus tôt possible, d’une usine moderne de raffinage du pétrole brut lourd camerounais », affirme le patron du cabinet Prescriptor.
A Dans la même veine, cet expert appelle de ses vœux une restructuration de la Société nationale de raffinerie (Sonara). « La Sonara est aujourd’hui un simple commerçant des produits pétroliers. Pour revenir à son rôle et à sa mission économique, et contribuer à la maîtrise des prix des produits pétroliers, son actionnaire majoritaire qu’est l’État doit tout mettre en œuvre pour garantir la préparation, la construction et la mise en service, le plus tôt possible, d’une usine moderne de raffinage du pétrole brut lourd camerounais », affirme le patron du cabinet Prescriptor.
A la réalité, il est très aisé de comprendre que l’Etat lui-même a mis un certain nombre de taxe sur prix du litre du carburant et autres produits pétroliers qui alourdissent le prix du produit à la consommation. Dire que les subventions coutent chers à l’Etat, c’est en effet se prévaloir de ses propres turpitudes, puisqu’il suffit de supprimer certaines taxes pour ne plus parler de subventions.
D’ailleurs qu’il est incorrect de parler de subvention dans le cas d’espèce, puisqu’on n’a jamais vu l’Etat débourser de l’argent pour financer le circuit des produits pétroliers.
Réaction de l’Expert
3 fakenews du gouvernement autour de l’augmentation des prix du carburant
Par Louis-Marie Kakdeu
Comme toujours et en bâclant la logique participative si chère à la bonne gouvernance, le gouvernement camerounais a opté hier pour le passage en force d’un réajustement à la hausse des prix du carburant à compter de ce 3 février 2023. Une situation disproportionnée dans la mesure où cette attaque coordonnée au pouvoir d’achat des citoyens avec effet immédiat n’a pas été suivie par des mesures de compensation pourtant promises par le Président de la République un mois plus tôt. Résigné à devoir gouverner par la force malgré sa Majorité obèse, le régime Biya diffuse des fakenews qu’il convient de démentir pour garantir la transparence et la bonne information des citoyens.
1. L’augmentation des prix se justifie par la conjoncture internationale : Faux !
Au moment où j’écris cet article, le prix du baril du pétrole est de 77 dollars américains, une tendance générale plutôt à la baisse depuis longtemps. Depuis plus d’un an, le prix n’a pas atteint 100 dollars. Je vous épargne des calculs mais, si l’on considère qu’un baril est équivalent à 159 litres, alors le prix du litre sur le marché international serait de 290 FCFA ce jour. La structure officielle des prix montre que le carburant est cher au Cameroun pour deux raisons : d’abord, le choix du régime en place de traiter avec des traders qui font dans la spéculation. Ce choix injustifié des intermédiaires permet aux agents publics corrompus et aux hommes d’affaires véreux de se faire payer des commissions et des rétro-commissions comme dans l’affaire Glencore qu’ils essaient d’enterrer. Ensuite, le choix du gouvernement de procéder à la surtaxation du carburant. Il existe environ 26 taxes et autres charges ajoutées sur le litre du carburant. En économie, c’est un choix plutôt ultralibéral que vient de suivre le nouveau Président nigérian pour relever le prix à la pompe. Cela n’a donc strictement rien à voir avec la conjoncture internationale. Cela relève bel et bien d’une décision de politique nationale.
2. Le gouvernement subventionne le carburant : Faux !
En économie, la subvention suppose simplement le transfert d’une ressource collectée dans un secteur vers un autre secteur à soutenir. Ce n’est pas du tout le cas au Cameroun. Lorsque l’on parcourt les comptes de l’Etat pendant les 10 dernières années, l’on ne voit pas la caisse où le gouvernement a puisé de l’argent pour subventionner le carburant. Cette disposition n’existe pas aussi dans les lois des finances. Dans les faits, même le moins perçu défendu par certains économistes est très discutable dans la mesure où vous ne pouvez pas ajouter 26 taxes et considérer que le remboursement d’une de ces taxes est une subvention. En clair, d’autres courants économiques recommandent plutôt que l’Etat renonce à la surtaxation en vue de soutenir le pouvoir d’achat et la consommation. La subvention dont on parle relève donc d’une propagande ultralibérale qui cache un scandale financier que nous soulèverons le moment venu. En effet, le gouvernement se comporte comme si la Caisse de Stabilisation des Produits des Hydrocarbures (CSPH) n’existait pas. Je ne reviens pas sur le scandale de la SONORA construite dans la logique coloniale pour annuler le statut de pays producteur du Cameroun. Le gouvernement camerounais perçoit chaque année plus de 400 milliards de FCFA d’impôt destiné à la construction de la SONORA. Pour nous parler de subvention, il faut nous faire les comptes de la SONARA et de la CSPH car, on ne peut pas dire subventionner ce que le citoyen-consommateur a déjà payé. Je reste pour l’instant sur la structure des prix à la pompe. Le citoyen camerounais n’a jamais profité de la tendance baissière du prix du baril de pétrole sur le marché international à cause de l’option du pays pour la création d’une caisse de stabilisation (CSPH). La logique était que la CSPH compense la tendance haussière par le bénéfice réalisé. Mais, a-t-on jamais vu cet argent dans la structure des prix ? Nous reviendrons sur ce scandale financier et nous vous dirons pourquoi le FMI fait le jeu du gouvernement.
3. La hausse des prix à la pompe vise à éviter des tensions dans l’approvisionnement du marché national : Faux !
Si le marché était libéralisé, les marketeurs camerounais s’approvisionneraient tranquillement au Nigéria comme dans 5 régions sur 10 au Cameroun (Extrême-nord, Nord, Adamaoua, Nord-Ouest et Sud-Ouest). Ce serait plus avantageux pour les citoyens-consommateurs. C’est encore le choix de créer la CSPH et de fixer les prix plafonnés qui menace l’approvisionnement du pays. Il faut dire la vérité : le pays est devenu insolvable puisqu’il ne paie pas à temps ses dettes malgré le fait que les ultralibéraux nous rappellent que cette dette qui représente 46% du PIB est en deçà du seuil communautaire de la CEMAC. Ce qui est important, c’est d’être déjà capable de rembourser le peu de dette que nous contractons. Les lettres de crédit du Cameroun ne sont plus acceptées. Le pays est en mode « payer avant d’être servi » comme dans les boutiques du quartier. Or, le pays est en situation de surliquidité. Le pays n’a pas d’argent alors que les camerounais ont l’argent : l’équation économique à résoudre est d’utiliser cet argent qui circule à travers le pays plutôt dans le circuit informel. Diversifier les fournisseurs du carburant est la solution. Le gouvernement refuse de le faire parce que cela suppose la baisse des prix à la pompe. Le mauvais cœur à l’état pur! Le FMI qui est normalement contre toute politique de contrôle des prix fait ce jeu parce que c’est la seule façon de garantir des recettes sûres qui permettront au gouvernement camerounais de rembourser ses dettes. Le FMI n’est pas au Cameroun pour nos beaux yeux. Ils sont là pour nous forcer à payer nos dettes. C’est la véritable raison de l’augmentation des prix à la pompe. A quoi a servi cette dette ? C’est un autre scandale financier sur lequel nous reviendrons. Les gars ont détourné plus de 8000 milliards de FCFA en 10 ans, c’est-à-dire presque le montant des dettes contractées. Il faut vivre au Cameroun pour écouter les histoires de ce gouvernement véreux.
Et c’est la faute de qui ? C’est la faute du clientélisme. Beaucoup de camerounais vivent de la pitance. Ils se font arroser par les miettes issues de l’argent détourné. Les membres du gouvernement véreux achètent ainsi leur silence et leur conscience. Allons-nous continuer d’être de ceux-là ?Alors que certains voulaient mettre fin aux souffrances des Camerounais, d’autres ont proposé la libéralisation de la corruption. A chacun de faire son auto-évaluation et de sortir de ce carcan. Il est temps d’accepter de semer la bonne graine et de supporter la période de la disette pour avoir plus tard une récolte abondante. A nous de voir !
Louis-Marie Kakdeu, MPA, PhD & HDR Deuxième Vice-Président National du SDF
Lire le dossier de Joseph Essama