Les États-Unis s’apprêtent à expulser 1 736 Camerounais en situation irrégulière d’ici juin 2025, selon les chiffres communiqués par l’ICE (Immigration and Customs Enforcement). Un chiffre alarmant qui, bien qu’officiel, ne représente qu’une portion visible de l’iceberg migratoire. Derrière cette statistique, ce sont des vies suspendues, des espoirs fracassés, et surtout le reflet d’un pays d’origine qui peine à retenir les siens.

L’envers du rêve américain

Parmi ces expulsables, nombreux sont ceux qui ont fui l’instabilité des régions anglophones, les persécutions politiques ou encore le marasme économique qui ronge le Cameroun. Entrés légalement ou par des voies irrégulières, beaucoup ont tenté l’asile, souvent sans succès. D’autres vivent dans la clandestinité, cumulant petits boulots, peur permanente et précarité légale. Si les procédures migratoires américaines se durcissent, c’est que l’ère est au filtrage plus qu’à l’accueil.

Le silence complice du Cameroun

Alors que l’on s’attendait à des négociations diplomatiques ou à un plaidoyer en faveur d’une régularisation partielle, le gouvernement camerounais coopère docilement avec Washington. Silence radio sur le plan national, aucune mesure visible d’anticipation, ni préparation sérieuse à une réintégration. Le régime préfère encadrer logistiquement les rapatriements, comme on réceptionnerait des colis non désirés. La question n’est pas : « Pourquoi reviennent-ils ? » mais plutôt : « Pourquoi sont-ils partis ? »

Un retour sans avenir ?

En parallèle, les estimations sur la diaspora irrégulière parlent de plus de 20 000 Camerounais vivant sans papiers aux États-Unis. Une partie d’eux vit dans la crainte quotidienne de l’arrestation, loin de l’image fantasmée des diasporas florissantes. Pour les 1 736 visés par les expulsions, le retour s’annonce amer. Aucun programme de réinsertion sérieux n’est annoncé, aucune cellule d’écoute psychologique, aucune perspective économique durable. Le retour au pays risque fort de rimer avec marginalisation.

Le vrai procès : celui du Cameroun

Au-delà de la logique sécuritaire des États-Unis, c’est le Cameroun qui est sur le banc des accusés. Pourquoi un pays aussi riche en ressources naturelles, en talents humains, en potentiel culturel, pousse-t-il sa jeunesse vers des destinations hostiles ? Pourquoi l’État semble-t-il plus préoccupé par les chiffres de croissance macroéconomique que par la saignée silencieuse de ses cerveaux, de ses bras, de ses espoirs ?

Le vrai drame n’est pas tant l’expulsion que la condition qui la rend préférable à une vie au pays. Ces chiffres, désormais publics, sonnent comme un rappel brutal : tant que le Cameroun n’investira pas sérieusement dans sa jeunesse, sa justice sociale, et sa gouvernance, l’exil restera la seule échappatoire pour beaucoup.

Charles Chacot Chime

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