
L’ancien président gabonais Ali Bongo Ondimba, son épouse Sylvia Bongo Ondimba et leurs enfants ont foulé le sol angolais ce vendredi 16 mai, après 19 mois de détention à Libreville. Leur libération, annoncée officiellement par la présidence angolaise, met un terme à une crise politique ouverte par le coup d’État du général Brice Clotaire Oligui Nguema en août 2023. Accueillis sous les auspices du président João Lourenço, également président en exercice de l’Union africaine (UA), les Bongo entament désormais un nouvel exil, loin d’un Gabon en pleine reconfiguration.
Une libération médiatisée et négociée
La présidence angolaise a confirmé l’arrivée de la famille Bongo à Luanda dans un communiqué accompagné de photos montrant l’ex-chef d’État et ses proches à l’aéroport. « À la suite des initiatives du président de la République d’Angola et président en exercice de l’Union africaine, João Lourenço, auprès du président Brice Oligui Nguema du Gabon, la famille Bongo a été libérée et vient d’arriver à Luanda », a-t-elle déclaré. Cette étape clé intervient cinq jours après la sortie de prison de Sylvia Bongo et de son fils Noureddin Bongo, libérés dans des conditions encore floues, mais perçus comme un prélude à la résolution de cette crise.
19 mois de turbulences post-coup d’État
Le 30 août 2023, le général Oligui Nguema renversait Ali Bongo, au pouvoir depuis 2009, peu après une élection présidentielle contestée. Accusant l’ancien régime de « corruption » et de « mauvaise gouvernance », la junte militaire avait justifié son intervention par la nécessité de « sauver le Gabon ». La famille Bongo, symbole d’un pouvoir dynastique instauré par Omar Bongo (père d’Ali, au pouvoir de 1967 à 2009), était alors placée en résidence surveillée, puis emprisonnée, suscitant des inquiétudes internationales.
L’Angola, médiateur clé de l’Union africaine
La libération des Bongo souligne le rôle diplomatique de l’Angola, pays influent en Afrique centrale. João Lourenço, engagé dans une médiation depuis des mois, a su convaincre la junte gabonaise, isolée sur la scène internationale depuis le coup d’État. L’UA, ferme sur le principe de « zéro coup d’État », avait suspendu le Gabon de ses instances, augmentant la pression sur le général Oligui Nguema. Cette issue témoigne d’un équilibre entre condamnation des putschs et recherche de solutions pragmatiques.
Quel avenir pour les Bongo et le Gabon ?
Si Luanda offre un refuge à la famille Bongo, son retour au Gabon semble exclu. La junte, qui promet une « transition inclusive », prépare des élections en 2025, mais son ouverture reste à prouver. Ali Bongo, affaibli par un accident vasculaire en 2018 et cette détention, pourrait incarner une opposition en exil, bien que son héritage politique soit contesté.
Côté angolais, cette opération renforce l’image de João Lourenço, artisan de stabilité régionale. Pour le Gabon, tourner la page des Bongo suppose de répondre aux attentes d’une population fatiguée par des décennies de pouvoir autoritaire.
Réactions et perspectives
Aucune déclaration officielle n’a encore été faite par les Bongo ou la junte gabonaise. Sur les réseaux sociaux, leurs soutiens saluent une « victoire de la diplomatie », tandis que leurs détracteurs y voient la fin d’une ère. La communauté internationale, notamment la France, ancienne puissance coloniale, observe prudemment ces développements.
En accueillant les Bongo, l’Angola écrit un nouveau chapitre de sa diplomatie, mais rappelle aussi les défis persistants de la gouvernance en Afrique. La libération, si elle apaise les tensions, n’efface pas les questions sur l’avenir démocratique du Gabon.
Emmanuel Ekouli