Roland Dumas, ministre des affaires étrangères sous François Mitterrand et ancien président du Conseil constitutionnel, est décédé le mercredi 3 juillet 2024 à l’âge de 101 ans. Sa carrière politique a été marquée par des affaires controversées, mais il restera dans l’histoire comme le fidèle “double” de Mitterrand. Cet article retrace la vie tumultueuse de Roland Dumas, de son parcours d’avocat renommé à son rôle d’ambassadeur officieux de Mitterrand, en passant par l’affaire Elf qui a terni sa réputation.
Le parcours d’un ténor des barreaux
Avant de se lancer dans la politique, Roland Dumas était un avocat renommé. Il a plaidé des affaires médiatiques marquantes, défendant des personnalités telles que Lacan, Picasso et même François Mitterrand lui-même. Il a été impliqué dans des procès sensibles, dont celui des “porteurs de valises” du réseau Jeanson, l’assassinat du prince de Broglie ou encore l’affaire des diamants de Valéry Giscard d’Estaing. Sa réputation de ténor des barreaux l’a accompagné tout au long de sa carrière politique.
L’homme de confiance de François Mitterrand
Roland Dumas était étroitement lié à François Mitterrand, qui l’a considéré comme son “double” fidèle. Leur collaboration a commencé dès les débuts de la carrière politique de Dumas, lorsque ce dernier a soutenu Mitterrand lors de l’élection présidentielle de 1965. Par la suite, Dumas est devenu l’émissaire discret et charmeur du futur président, jouant un rôle d’ambassadeur officieux dans les relations avec des pays tels que le Gabon, la Libye ou le Tchad. Malgré ses détracteurs, il a été un soutien indéfectible de Mitterrand jusqu’à sa mort.
La tourmente de l’affaire Elf
L’affaire Elf a marqué la fin de la carrière politique de Roland Dumas. Accusé de complicité d’abus de bien sociaux, il a été mis en examen en 1997, quelques mois après l’incarcération de son ex-compagne Christine Deviers-Joncour, également impliquée dans cette affaire. Dumas a clamé son innocence et dénoncé un complot visant à atteindre la mémoire de François Mitterrand. Bien qu’il ait été relaxé en appel en 2003, sa réputation a été entachée par cette affaire.
Les polémiques et les dernières années
Les dernières années de Roland Dumas ont été marquées par des controverses. Il a été condamné en 2007 pour complicité d’abus de confiance dans une affaire liée à la succession du sculpteur Alberto Giacometti. Il a également été critiqué pour ses prises de position complotistes sur les attentats du 11 septembre. Malgré les polémiques, Dumas restait imperturbable et se comparait volontiers à Talleyrand, l’homme d’État français du XIXe siècle.
La mort de Roland Dumas marque la fin d’une époque politique marquée par sa fidélité à François Mitterrand et par des affaires controversées. À la fois avocat renommé et homme politique influent, il laisse derrière lui un héritage complexe et sulfureux. Sa carrière tumultueuse et sa proximité avec Mitterrand resteront gravées dans l’histoire politique de la France.
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Sa vie en dates
23 août 1922. Naissance à Limoges (Haute-Vienne).
18 mai 1942. Engagé dans la Résistance, il est arrêté et interné « pour motif politique » au fort Barraux entre le 19 et le 31 mai 1942.
1950. Inscription comme avocat au barreau de Paris.
19 janvier 1956. Élu député de la Haute-Vienne. Il sera réélu, en Corrèze puis en Dordogne, plusieurs fois jusqu’en 1988.
18 décembre 1983. Entre au gouvernement de Pierre Mauroy comme ministre délégué aux affaires européennes.
1984-1986 et 1988-1993. Ministre des affaires étrangères.
22 février 1995. Nommé président du Conseil constitutionnel par François Mitterrand, deux mois avant la fin de son mandat.
29 février 2000. Démission du Conseil constitutionnel en raison de sa mise en examen dans l’affaire Elf. Relaxé en janvier 2003.
2007. Condamnation pour complicité d’abus de confiance, dans le cadre de la succession du sculpteur Alberto Giacometti.
Emmanuel Ekouli